Pourquoi ne pas se servir du tram pour transporter des marchandises en ville ? Question simple dont la réponse semble évidente, a fortiori lorsque les lignes existent et que le matériel roulant peut être mis à contribution sans trop de transformations.
Cette question, l’Institut de recherche et de développement pour la transition énergétique de la ville Efficacity se l’est posée, et a entamé voici quelque temps une réflexion avec la Métropole de Saint-Etienne et nos équipes.
Le projet a mûri ; il a franchi de nombreuses étapes, il est prêt aujourd’hui à rentrer dans sa phase d’expérimentation. Pour parvenir à ce premier résultat, il a fallu récupérer une ancienne rame du tram stéphanois, procéder aux aménagements nécessaires -démontage des sièges, mise à nu de l’intérieur des wagons, installations de matériels permettant un chargement / déchargement rapide des colis et marchandises- et penser toute la logistique. Avec une obligation incontournable, ne pas gêner le trafic du « vrai » tram, très prisé par les habitants (en journée, on compte une rame toutes les 6 minutes sur le réseau de Saint-Etienne).
Les divers essais et simulations réalisés montrent que la cohabitation entre rames voyageurs et TramFret se passe sans encombre ; et que le projet trouve toute sa justification dans un contexte marqué à la fois par le développement constant du transport urbain de marchandises et la nécessité d’avancer en termes de respect de l’environnement. Un jour, les camions ne pourront plus rouler dans les centres urbains ; le TramFret est l’une des solutions de remplacement. Certains de nos voisins européens l’ont bien compris : à Dresde par exemple, l’entreprise Volkswagen utilise des trams entre son dépôt logistique et une usine de montage située au centre de la ville. A Zurich, des trams transportent des encombrants et des déchets électroniques.
Dans la métropole qui nous intéresse, la grande enseigne de distribution Casino voit d’un œil très favorable l’expérimentation en cours : le tram permettrait d’approvisionner avec une grande régularité -hiver comme été- une quinzaine de ses magasins situés non loin de la ligne. Le CHU de Saint-Etienne, écartelé entre le nord et le sud de la ville, prend également la défense du projet : le tram pourrait servir à livrer de façon fonctionnelle et sûre les repas préparés pour l’ensemble de ses antennes.
Afin de livrer deux magasins de proximité du Groupe Casino dans le cadre de 3 semaines d’expérimentation en conditions réelles, la première rame est prête ; simple et fiable, elle a déjà une petite sœur en gestation, un futur TramFret « phase 2 » qui jouirait d’une technologie plus sophistiquée notamment en matière d’automatisation. Mais ne soyons pas trop pressés. Très active en matière de logistique urbaine, la métropole stéphanoise garde sans doute en mémoire la célèbre pensée latine : « festina lente »… hâte toi lentement…
Henri Saïsset, responsable du Pôle Etudes de Mobilité